
Au Canada, une personne sur cinq souffre de douleur chronique.
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Une équipe de recherche de l'Université Laval vient d'identifier deux biomarqueurs qui ouvrent de nouvelles perspectives dans la gestion de douleurs musculosquelettiques chroniques (DMC). Ces deux marqueurs – l'acrylamide et le cadmium – sont des composés toxiques présents dans la fumée de cigarette, mais aussi dans la nourriture et dans d'autres produits auxquels nous sommes exposés quotidiennement.
«Notre hypothèse est que leur accumulation dans l'organisme pourrait avoir un effet sur le système nerveux et contribuer aux DMC, du moins chez une partie des personnes qui en souffrent», avance le responsable de l'étude, Clermont Dionne, professeur au Département de médecine sociale et préventive et chercheur au Centre de recherche du CHU de Québec – Université Laval et à VITAM – Centre de recherche en santé durable.
Le chercheur souligne que les traitements existants contre des DMC sont peu efficaces ou ils ont des effets secondaires indésirables importants. «À défaut de mieux, on propose aux gens d'apprendre à gérer leur douleur.» L'existence de biomarqueurs fiables ouvrirait des avenues intéressantes pour la prévention et le traitement des DMC, poursuit-il.
«D'abord, l'évaluation de ces douleurs pourrait s'affranchir du caractère essentiellement subjectif qu'elle a présentement. Ensuite, il serait possible de suivre l'évolution de ces douleurs chez un patient et d'évaluer l'efficacité des interventions qui lui sont proposées. Enfin, il serait possible d'appliquer des mesures de prévention pour éviter l'exposition à ces deux produits et peut-être même de développer des traitements pour en réduire les concentrations dans l'organisme. Il faut envisager de nouvelles approches dans la prise en charge des DMC parce que nous sommes dans un cul-de-sac depuis un bon moment.»
Pour identifier les marqueurs, l'équipe de recherche a profité du fait que les DMC, pour des raisons encore inconnues, sont très fréquemment associés au tabagisme. Elle a utilisé des données d'une vaste enquête américaine sur la santé et la nutrition qui portaient sur 3670 sujets dont 25% étaient des fumeurs réguliers ou occasionnels. Les résultats montrent un accroissement du risque de DMC en fonction de la consommation de tabac.
Des analyses subséquentes ont permis de lier cette hausse à l'acrylamide et au cadmium. Isolément, ces deux composés augmentent le risque de DMC de 24% et de 56% respectivement, alors que leur effet combiné double le risque par rapport à ce qui est observé chez les non-fumeurs.
Une étude antérieure observait également une association statistique entre les concentrations sanguines d'acrylamide et de cadmium et les DMC au cou, aux épaules et au bas du dos dans un groupe représentatif de la population générale. «Ces résultats concordants suggèrent que ces composés pourraient constituer des biomarqueurs particulièrement intéressants au regard des DMC pour toute la population», résume le professeur Dionne.
L'étude a été publiée dans la revue Pain. Les signataires sont Codjo Djignefa Djade, Caroline Diorio, Danielle Laurin, Denis Talbot, Pierre-Hugues Carmichael et Clermont Dionne.