10 avril 2024
Une nouvelle étude prometteuse pourrait mener à une réduction des symptômes de la sclérose latérale amyotrophique
Cet article est tiré de The Conversation, un média en ligne d'information et d'analyse de l'actualité indépendant qui publie des articles grand public écrits par des scientifiques et des universitaires, dont l'Université Laval est partenaire.
Un texte signé par Mari Carmen Pelaez, étudiante au doctorat, Antoine Desmeules, étudiant à la maîtrise, et Chantelle F. Sephton, professeure à la Faculté de médecine.
Chaque année, environ 1 000 Canadiens reçoivent un diagnostic de sclérose latérale amyotrophique (SLA, aussi connue sous le nom de maladie de Lou Gehrig). Et 4 000 Canadiens vivent actuellement avec cette maladie.
Il existe peu de traitements efficaces pour ralentir sa progression. Malheureusement, la plupart des personnes qui en souffrent décèdent deux à cinq ans après leur diagnostic.
Chercheurs en neurosciences, nous consacrons nos travaux à tenter de trouver des manières de réduire les symptômes de la SLA. Dans cet article, nous discuterons des résultats prometteurs de l’une de nos récentes études.
La SLA, une maladie complexe
La SLA est une maladie neurodégénérative. Les personnes qui en sont atteintes perdent graduellement la capacité à effectuer des mouvements volontaires en raison d’une perte de communication entre le système nerveux et les muscles.
Depuis la première description de cette maladie par le neurologue Jean-Martin Charcot en 1874, notre compréhension scientifique de la SLA a beaucoup évolué.
De nos jours, il est largement reconnu que la SLA est une maladie qui affecte plusieurs types de cellules comme les cellules immunitaires, les cellules musculaires, les cellules gliales (celles qui entourent et isolent les neurones) et les neurones. Or, pour des raisons toujours inconnues, les motoneurones, soit les cellules responsables de contrôler les mouvements volontaires et involontaires, sont particulièrement vulnérables.
S’attaquer aux motoneurones
Les motoneurones ont une morphologie complexe avec plusieurs projections, comme les branches d’un arbre. Elles connectent le cerveau et la moelle épinière aux muscles. Ce sont ces connexions neuronales avec les muscles qui sont responsables des mouvements volontaires comme marcher, parler et manger.
Chez les personnes atteintes de la SLA, les motoneurones dégénèrent et meurent, menant à une faiblesse musculaire et, ultimement, à la paralysie. En raison de la complexité de la SLA et du manque de thérapies efficaces, il existe un besoin urgent de mieux comprendre cette maladie afin de développer davantage de stratégies thérapeutiques.
Notre équipe de recherche au département de psychiatrie et neurosciences de l’Université Laval consacre ses recherches à la compréhension des changements pathologiques précoces qui surviennent chez les motoneurones avant leur mort. L’objectif ? Identifier et développer des interventions thérapeutiques qui peuvent inverser ces changements précoces et ralentir la progression de la maladie.
Comment les neurones perdent-ils leur connectivité ?
En utilisant la souris comme modèle, nous avons effectué des modifications génétiques permettant de recréer le handicap moteur et cognitif découlant de la SLA.
Nous avons découvert que les changements dans la morphologie des motoneurones du cerveau surviennent tôt dans le processus de la maladie. Et ce, avant même que des changements dans les fonctions motrices soient perçus.
Nous avons également découvert qu’un déclin des fonctions motrices était associé à la dégénérescence des motoneurones et à la perte de synapses. Les synapses servent de point de communication entre les motoneurones, connectant le cerveau et la moelle épinière aux muscles.
De plus, notre étude a permis de constater que les astrocytes et les microglies, les cellules immunitaires du cerveau et de la moelle épinière, étaient hautement activés lors de la perte de synapses et du déclin des fonctions motrices.
Cette suractivation des astrocytes et des microglies, que l’on peut qualifier de neuroinflammation, change la morphologie des motoneurones et nuit à leur interconnectivité. Ces changements affectent le réseau neuronal, perturbant la transmission de l’information.
Peut-on rétablir la connexion entre les motoneurones ?
Nous nous sommes ensuite demandé si, en bloquant la neuroinflammation (par exemple, l’activation des astrocytes et des microglies), il était possible de rétablir la morphologie et la connectivité des motoneurones.
Afin de tenter de répondre à cette question, nous avons testé l’efficacité d’un médicament semi-synthétique à base de withaferine A, un extrait de la plante ashwagandha qui est utilisée depuis des milliers d’années dans la médecine traditionnelle indienne.
Les résultats de notre étude montrent qu’en bloquant l’activation des astrocytes et des microglies, prévenant donc l’inflammation, la morphologie des motoneurones ainsi que leurs connexions synaptiques pouvaient être restaurées.
Ces résultats prometteurs coïncident avec des améliorations cognitives et motrices observées chez notre modèle de souris de la SLA.
L’inflammation et la perte de synapses sont communes à plusieurs maladies neurodégénératives dont la SLA, la maladie d’Alzheimer et de Parkinson.
Par conséquent, les approches thérapeutiques bloquant l’inflammation et encourageant le rétablissement de la morphologie des neurones et des connexions synaptiques pourraient avoir une application plus large pour le traitement des maladies neurodégénératives.
Les futurs travaux effectués par notre équipe viseront à développer davantage les stratégies de traitement ciblant l’inflammation et rétablissant les fonctions synaptiques dans la SLA.
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.