7 février 2024
Sept conseils pratiques pour les parents vivant avec un TDAH
Cet article est tiré de The Conversation, un média en ligne d'information et d'analyse de l'actualité indépendant qui publie des articles grand public écrits par des scientifiques et des universitaires, dont l'Université Laval est partenaire.
Un texte co-signé par André Plamondon, professeur titulaire à la Faculté des sciences de l'éducation.
Les parents atteints de TDAH peuvent vivre des difficultés, mais avoir aussi certaines forces, en particulier lorsque leur enfant en est également atteint. Ainsi, ils pourraient faire preuve de plus d’empathie et de tolérance à l’égard des problèmes de leur enfant et mieux jouer avec lui.
Il arrive souvent que le trouble du déficit de l’attention (TDAH), avec ou sans hyperactivité, ne soit pas diagnostiqué chez les adultes, mais il a une incidence considérable sur la vie familiale si les parents en souffrent.
Un parent avec TDAH peut avoir du mal à gérer son temps et à se concentrer. Même s’il semble avoir la situation bien en main, sa vie quotidienne peut être chaotique, avec des rendez-vous manqués, de la difficulté à se souvenir des règles et à les faire respecter à la maison, ou à s’acquitter de ses responsabilités.
Lorsqu’il est stressé, un parent atteint de TDAH peut vivre des moments de frustration et de colère en réponse à des provocations mineures. Ces difficultés émotionnelles engendrent dans certains cas des réactions brutales à l’égard de son enfant, que le parent peut regretter par la suite.
Comprendre le TDAH chez l’adulte
Le TDAH comporte différents types d’inattention (oubli, difficulté à rester concentré), d’hyperactivité (bougeotte, agitation) et d’impulsivité (interruption de conversations ou prise de parole maladroite). Comme le TDAH est fortement héréditaire, il est très probable que des parents qui en sont atteints aient un enfant qui l’est aussi.
On estime que 8 % des enfants souffrent de TDAH, alors que seulement 3 % des adultes répondent aux critères de ce trouble. Cette différence peut s’expliquer par le fait que les symptômes s’atténuent avec l’âge, en particulier ceux d’hyperactivité et d’impulsivité.
Bien que certaines personnes ne répondent plus aux critères de diagnostic du TDAH à l’âge adulte, elles peuvent encore avoir des difficultés importantes dans leur vie. Par exemple, leur santé physique et leur situation socio-économique sont souvent moins bonnes que celles des personnes qui n’ont pas d’antécédents de TDAH.
Cependant, la recherche a montré que, depuis une dizaine d’années, on remarque une hausse des diagnostics de TDAH chez l’adulte, peut-être en raison d’une plus grande connaissance du TDAH ou du fait qu’il soit plus facile d’obtenir une évaluation clinique. Selon des récits anecdotiques, il arrive souvent que les parents se rendent compte de leurs symptômes de TDAH au moment où ils vont chercher de l’aide pour leur enfant
Effets du TDAH sur l’éducation des enfants
La transmission héréditaire du TDAH a des répercussions importantes, car elle peut influencer la façon dont les parents interagissent avec leurs enfants. Des recherches ont montré que les symptômes du TDAH chez les parents sont associés à des comportements plus sévères (par exemple, crier après un enfant, réagir de manière excessive et le punir sévèrement) et à des pratiques plus laxistes (par exemple, avoir une discipline incohérente ou de la difficulté à instaurer des limites).
Cela semble compatible avec les symptômes du TDAH, notamment les problèmes liés à l’oubli et à l’impulsivité. Les personnes atteintes de TDAH ont souvent du mal à réguler les émotions intenses. Ces symptômes réunis peuvent faire qu’il est plus difficile pour les parents de rester calmes et constants lorsqu’ils interagissent avec leur enfant.
Toutefois, des études montrent également que les symptômes du TDAH chez les parents ne semblent pas avoir d’incidence sur leur capacité à être affectueux, attentifs et aimants.
D’autres recherches indiquent qu’il existe une « adéquation de similarité » (similarity fit) lorsque le parent et l’enfant sont atteints de TDAH. Dans ces familles, les parents TDAH peuvent faire preuve de plus d’empathie et de tolérance à l’égard des difficultés de leur enfant et être en mesure de mieux jouer avec lui parce qu’ils peuvent suivre la cadence de son jeu.
Stratégies pratiques pour les parents TDAH
Élever un enfant avec un TDAH peut s’avérer complexe. Celui-ci bénéficie souvent de stratégies précises, telles que l’établissement de règles claires et de limites cohérentes, l’utilisation d’un système qui récompense les comportements appropriés et le fait de passer beaucoup de temps de qualité avec ses parents. Ces stratégies peuvent être difficiles à maintenir pour les parents qui ont un TDAH.
Voici quelques stratégies pratiques qui pourraient être utiles aux parents qui souffrent de TDAH ou qui pensent en souffrir :
1. Rechercher l’aide d’un professionnel pour les symptômes de TDAH.
Si un parent croit avoir un TDAH, mais n’a pas de diagnostic, il peut consulter un professionnel de la santé. Les médecins de famille et les psychiatres peuvent proposer des médicaments, tandis que les psychologues peuvent offrir une thérapie cognitivo-comportementale, un traitement très efficace pour le TDAH chez l’adulte.
2. Demander du soutien pour des questions particulières liées à l’éducation des enfants
Il existe des cours gratuits en ligne qui s’appuient sur des recherches, comme celui-ci, et celui-là qui est spécialement conçu pour les pères (bien que les mères et d’autres personnes responsables d’un enfant soient également les bienvenues !)
Les psychologues cliniciens et les travailleurs sociaux spécialisés dans le travail avec les enfants et les adolescents, ainsi qu’avec leurs parents, constituent une autre ressource. Il peut être intéressant de chercher une personne qui propose une formation comportementale destinée aux parents, un traitement fondé sur des données probantes pour le TDAH chez l’enfant.
Il est conseillé de signaler au thérapeute que l’on présente également de symptômes de TDAH. Certaines études montrent que des ajustements – que ce soit pour la cadence (en se concentrant sur un seul aspect par séance, en s’assurant de faire beaucoup de répétitions, etc.), l’ajout d’exercices ou d’une thérapie avec groupe de soutien – peuvent être utiles pour les parents TDAH.
3. Pratiquer la bienveillance envers soi-même
Le TDAH affecte certaines zones du cerveau et, rappelons-le, il est hautement héréditaire. Ce n’est pas son éducation ou les gestes de son parent qui causent le TDAH d’un enfant.
Il n’est pas facile d’être parent, et ce l’est encore moins si l’on présente des symptômes de TDAH ou que son enfant en souffre. C’est tout à fait naturel que la situation paraisse parfois ingérable ! Il est normal d’avoir des émotions négatives et de demander le soutien de sa famille et de ses amis lorsque possible.
En travaillant (avec ou sans aide professionnelle) à l’élaboration de techniques d’adaptation, un parent donne à son enfant l’occasion d’observer et d’apprendre par l’exemple.
4. Utiliser des outils organisationnels pour gérer les symptômes du TDAH
Au lieu de se fier uniquement à leur mémoire, les personnes atteintes de TDAH trouvent souvent utile de tenir un calendrier, un agenda ou une liste de choses à faire. La création d’un registre externe des tâches et des rendez-vous, même si on ne le consulte pas constamment, peut augmenter les chances de se souvenir de ses responsabilités. Des études montrent que, pour les personnes présentant d’importants symptômes de TDAH, l’utilisation de ces types de stratégies compensatoires est associée à moins de pratiques parentales négatives.
5. Réfléchir de manière proactive aux situations récurrentes
Pour les situations parentales éprouvantes qui reviennent souvent, il peut être utile de réfléchir aux problèmes courants qu’on pourrait aborder de manière proactive. On peut se pencher sur les comportements difficiles particuliers rencontrés avec un enfant, ainsi qu’à leur contexte (par exemple, l’endroit où cela a eu lieu, ce qui s’est passé avant et après).
Cela permet de reconnaître des déclencheurs qu’on pourrait modifier de manière préventive la prochaine fois qu’on se retrouvera dans une situation semblable – voir ce journal de bord (en anglais). Un exemple simple : si un enfant se comporte toujours mal lorsqu’il s’ennuie, on peut prévoir un sac d’activités à emporter.
6. Réfléchir à la façon dont on perçoit son enfant
Des recherches indiquent que les parents souffrant de TDAH ont tendance à accuser davantage leurs enfants (par exemple, « mon enfant a volontairement renversé le lait ») que les parents qui n’en souffrent pas. Cela peut les rendre plus enclins à réagir sévèrement.
Si on a ce genre de pensées, il peut être utile de faire une pause et de réfléchir à d’autres façons d’expliquer le comportement de son enfant (par exemple, il était trop excité et a renversé le lait par accident).
Des études montrent qu’il peut être bénéfique de remarquer les moments où son enfant se comporte bien et de le féliciter.
7. Se rappeler ses points forts
Les adultes atteints de TDAH peuvent être des parents chaleureux, aimants et très impliqués. Une parentalité positive est liée à une amélioration de la santé mentale de l’enfant. Il vaut donc la peine de se concentrer sur le développement des aspects positifs de sa relation avec son enfant.
En appliquant des stratégies efficaces pour gérer le TDAH et en recourant à des ressources en cas de besoin, les parents qui en sont atteints peuvent créer une vie de famille positive et épanouissante, et constituer une source de soutien solide pour leurs enfants qui risquent de rencontrer des problèmes similaires.
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.