25 juillet 2024
Les Canadiens s’informent moins sur Facebook qu’auparavant
Cet article est tiré de The Conversation, un média en ligne d'information et d'analyse de l'actualité indépendant qui publie des articles grand public écrits par des scientifiques et des universitaires, dont l'Université Laval est partenaire.
Un texte signé par la professeure Colette Brin et le chargé de cours Sébastien Charlton à la Faculté des lettres et des sciences humaines.
Les Canadiens s’informent moins sur Facebook qu’avant la décision de Meta de bloquer les contenus journalistiques sur certaines de ses plates-formes. La tendance était toutefois déjà engagée avant cette mesure et s’observe également à l’international.
Voilà un des faits saillants de la dernière édition canadienne du Digital News Report (DNR). Cette enquête annuelle, réalisée par une équipe internationale de chercheurs, a sondé en 2024 quelque 95 000 consommateurs de nouvelles dans 47 pays, représentant la moitié de la population mondiale.
Le Centre d’études sur les médias, dont Sébastien Charlton et moi-même, respectivement chargé de cours et professeure au département d’information et de communication de l’Université Laval, sommes coordonnateur et directrice, est responsable du volet canadien de l’enquête.
Un déclin généralisé
Près de trois Canadiens sur quatre (73 %) disent consulter les nouvelles tous les jours. Cette proportion n’a pas diminué depuis les mesures prises par Meta. Comme on pouvait s’y attendre toutefois, moins de gens affirment avoir utilisé Facebook dans la semaine précédant le sondage pour suivre, partager ou commenter l’actualité, soit 25 % comparativement à 29 % en 2023.
En fait, pour la première fois depuis que le Canada fait partie de l’enquête, YouTube (29 %, une hausse de 4 points de pourcentage (pp) par rapport à 2023) est davantage utilisé que Facebook pour s’informer au pays. Mais la tendance à la baisse de Facebook était déjà bien entamée et s’observe également dans des pays où l’ensemble des contenus journalistiques demeurent accessibles sur cette plate-forme.
En effet, selon le DNR, l’utilisation de Facebook pour suivre l’actualité dans 12 marchés internationaux (Royaume-Uni, États-Unis, Allemagne, France, Espagne, Italie, Irlande, Danemark, Finlande, Australie, Brésil et Japon) est en baisse de 16 pp depuis 2016 (de 42 % en 2016 à 26 % en 2024). Pour la même période, la baisse canadienne est un peu plus importante, soit de 21 pp (de 46 % à 25 %).
Ce sont les 18-34 ans qui tendent à déserter Facebook de manière générale, et pas seulement en tant que plate-forme d’information. Moins de la moitié (46 %) des répondants de ce groupe dit l’avoir consulté, peu importe la raison, dans la semaine précédant l’enquête, comparativement aux deux tiers (65 %) des 35 ans et plus. En 2016, les trois quarts (77 %) des 18-34 ans avaient utilisé Facebook, tout comme 67 % des 35 ans et plus.
La fiabilité des nouvelles
Fait à noter, malgré les restrictions imposées par Meta sur les contenus journalistiques, une grande partie des utilisateurs canadiens de Facebook et Instagram estiment qu’il est facile d’y distinguer les nouvelles dignes de confiance de celles qui ne le sont pas sur leurs plates-formes (respectivement 48 % des utilisateurs de Facebook et 44 % de ceux d’Instagram).
Parmi les grandes plates-formes étrangères ciblées dans le questionnaire (graphique 1), seules les personnes qui se servent de Google Search (60 %) ou de YouTube (51 %) sont plus portées à trouver cela facile. À l’inverse, TikTok est la plate-forme pour laquelle les utilisateurs ressentent le plus de difficulté à distinguer les nouvelles dignes de confiance de celles qui ne le sont pas. S’ils sont 40 % à trouver cela facile, un utilisateur sur trois (33 %) de ce média social considère cette tâche comme difficile. À l’échelle mondiale, TikTok est également le média social pour lequel une plus grande part d’utilisateurs peinent à identifier les informations fiables.
Méfiance envers l’intelligence artificielle
Parmi les autres constats de l’enquête canadienne, également conformes aux tendances internationales, notons une certaine méfiance envers l’intelligence artificielle (IA).
Une majorité de Canadiens (52 %) indiquent ne pas être à l’aise avec l’idée que des nouvelles soient produites principalement par de l’IA avec une certaine surveillance humaine. Seule une petite partie accueille favorablement cette pratique (17 %).
Lorsqu’on réduit le rôle de l’IA dans la production de nouvelles pour en faire une simple aide pour un journaliste humain, l’opinion est toutefois plus positive : 39 % des Canadiens sont à l’aise avec cette idée et 27 % font part de leur malaise. Ici comme ailleurs, les personnes qui disent s’être informées davantage sur l’IA sont plus souvent à l’aise avec l’idée qu’on l’utilise dans la production de nouvelles.
Pour ce qui est des sujets spécifiques, d’un pays à l’autre, la production de nouvelles principalement par l’intelligence artificielle crée davantage un malaise pour les questions politiques que pour des sujets plus légers comme le sport ou le divertissement.
Consommation de nouvelles payantes
Rappelons enfin qu’en 2023, l’édition canadienne du DNR indiquait une baisse du paiement pour des nouvelles en ligne ou de l’accès à services de nouvelles payants en ligne pour la première fois depuis que ces données sont compilées au pays.
En 2024, cette pratique est remontée à son niveau de l’enquête de 2022 au Canada, avec 15 % des répondants qui disent avoir fait l’un ou l’autre dans la dernière année.
On observe par ailleurs un plafonnement de la consommation de nouvelles payantes à l’international.
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.